Argumentaire Gaillet : Europe et monopole Sécurité Sociale
Jean-Pierre Gaillet est membre d’Attac
Voici [...] le fruit de diverses compilations concernant les rapports entre l’Europe et le monopole de la sécurité sociale [...] merci à Claude Barratier qui a fourni une partie de la documentation et donné des avis pertinents.
Le texte est un peu long mais j’ai essayé d’être assez exhaustif, il ne s’agit pas d’un tract mais du regroupement de quelques textes de référence sur le sujet.
Jean-Pierre Gaillet
EUROPE ET MONOPOLE DE LA SECURITE SOCIALE
Si, dans le texte du projet de traité constitutionnel Européen, on recherche les mots « sécurité sociale », on découvre qu’ils n’apparaissent qu’une seule fois à l’article II 94 :
« Sécurité sociale et aide sociale
1. L’Union reconnaît et respecte le droit d’accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux assurant une protection dans des cas tels que la maternité, la maladie, les accidents du travail, la dépendance ou la vieillesse, ainsi qu’en cas de perte d’emploi, selon les règles établies par le droit de l’Union et les législations et pratiques nationales. »
En clair, pour les rédacteurs du projet, la sécurité sociale n’est un droit que selon les règles déjà établies par l’Europe et les règles nationales, la constitution n’apporte rien de nouveau.
Pourtant on a assisté à quelques offensives de la part d’ultra-libéraux, bien souvent poujadistes sur le thème « Le monopole de la sécurité sociale c’est fini, nous allons pouvoir choisir librement entre la sécu et des assurances privées. »
Au premier rang de cette offensive, Claude Reichman, animateur d’un groupe poujadiste mais aussi Christian Picart, le président de l’entreprise de restauration Buffalo Grill.
Pourquoi vouloir ainsi supprimer le monopole de la sécurité sociale ? Bien évidemment, si demain la sécurité sociale se retrouvait en concurrence avec des sociétés d’assurance privées, celles-ci pratiqueraient des tarifs différenciés en fonction des risques.
Au personnel de Buffalo Grill, plutôt jeune et en bonne santé, ils seraient en mesure de proposer des tarifs inférieurs à ceux de la sécurité sociale. Il s’agirait donc là d’un moyen commode de « baisser les charges ».
Que, de ce fait, la sécurité sociale perde de l’argent et soit encore moins en mesure d’assurer son rôle de solidarité, nos ultra-libéraux n’en ont cure.
Son vieux principe « chacun cotise selon ses revenus et reçoit selon ses besoins » doit d’ailleurs donner des boutons à ces ultra-libéraux
La législation européenne : La première mesure, portant en germe la remise en cause du monopole de la sécurité sociale date du 11 AOUT 1992 :
La directive 92/49/CEE du Conseil, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l’assurance directe était publiée ce jour là au Journal officiel des Communautés européennes. Elle, stipule :
" Considérant que le marché intérieur comporte un espace sans frontières intérieures et implique l’accès à l’ensemble des activités d’assurances autres que l’assurance sur la vie dans toute la Communauté et, dès lors, la possibilité de couvrir n’importe quel risque parmi ceux visés à l’annexe de la directive 73/239/CEE ; qu’à cet effet il est nécessaire de supprimer tout monopole dont jouissent certains organismes dans certains Etats membres pour la couverture de certains risques. " (Point 10).
La directive 73/239/CEE, à laquelle il est fait référence, précise que « Les risques visés à l’annexe sont notamment ceux ci : " 1. Accidents (y compris les accidents du travail et les maladies professionnelles) prestations forfaitaires, prestations indemnitaires, combinaisons, personnes transportées. 2. Maladie prestations forfaitaires, prestations indemnitaires, combinaisons. »
Le 9 décembre 1992, la directive 92/96/CEE du Conseil publiée au Journal officiel des Communautés européennes en rajoutait une couche :
" Considérant que, dans le cadre d’un marché intérieur, il est dans l’intérêt du preneur d’assurance que celui ci ait accès à la plus large gamme de produits d’assurance offerts dans la Communauté pour pouvoir choisir parmi eux celui qui convient le mieux à ses besoins. " (Point 20). A cet effet, il convient " de permettre à tous les preneurs d’assurance, qu’ils prennent l’initiative eux-mêmes ou non, de faire appel à tout assureur ayant son siège social dans la Communauté. " (Point 3).
Adaptation des lois françaises aux directives européennes : Restait à faire passer ces directives dans le cadre de la loi française : Les lois n° 94 5 du 4 janvier 1994 et n° 94 678 du 8 août 1994, portant transposition des directives 92/49/CEE et 92/96/CEE des 18 juin et 10 novembre 1992 du Conseil des Communautés européennes, ont modifié le code des assurances et le code de la sécurité sociale :
L’article L.931-1 du code de la sécurité sociale stipule : " Les institutions de prévoyance sont des personnes morales de droit privé ayant un but non lucratif, administrées paritairement par des membres adhérents et des membres participants définis à l’article L. 931 3. Elles ont pour objet : a) de contracter envers leurs participants des engagements dont l’exécution dépend de la durée de la vie humaine, de s’engager à verser un capital en cas de mariage ou de naissance d’enfants ou de faire appel à l’épargne en vue de la capitalisation et de contracter à cet effet des engagements déterminés ; b) de couvrir les risques de dommages corporels liés aux accidents et à la maladie ; c) de couvrir le risque chômage. "
Restait l’expression « but non lucratif », autrement dit assurances mutuelles qui ne satisfaisait ni les libéraux, ni les juges européens.
Condamnation de la France par la cour de Justice Ce premier texte ne suffisant pas, la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) a, par un arrêt du 16 décembre 1999 (affaire C 293/98), condamné la République française " pour avoir manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des directives. "
Le gouvernement français s’est donc fait attribuer par le Parlement le droit de légiférer par ordonnances (Loi n° 2001 1 du 3 janvier 2001), parue au Journal officiel du 4 janvier 2001. C’est ainsi qu’a paru au Journal officiel du 22 avril 2001 l’ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001 relative au code de la mutualité et transposant les directives 92/49/CEE et 92/96/CEE du Conseil des 18 juin et 10 novembre 1992.
L’article 3 de l’ordonnance stipule : " Sont abrogées les dispositions de nature législative du code de la mutualité dans sa rédaction issue de la loi n° 85 773 du 25 juillet 1985 portant réforme du code de la mutualité, ainsi que les textes qui l’ont complétée ou modifiée. "
L’article L. 111-1 du code de la mutualité annexé à l’ordonnance stipule : « Les mutuelles peuvent avoir pour objet : 1) De réaliser les opérations d’assurance suivantes : a) Couvrir les risques de dommages corporels liés à des accidents ou à la maladie ; b) Contracter des engagements dont l’exécution dépend de la durée de la vie humaine, verser un capital en cas de mariage ou de naissance d’enfants, faire appel à l’épargne en vue de la capitalisation en contractant des engagements déterminés ; c) Réaliser des opérations de protection juridique et d’assistance aux personnes ; d) Couvrir le risque de perte de revenus lié au chômage. »
Et Claude Reichman pouvait ainsi conclure un article paru dans le Figaro « Il ressort clairement de tous ces textes que les Français peuvent s’assurer librement, pour tous les risques relatifs à la maladie, la vieillesse, les accidents du travail et le chômage auprès de la Sécurité sociale, d’une société d’assurance, d’une institution de prévoyance ou d’une mutuelle. De nombreuses mutuelles françaises ont obtenu l’agrément des pouvoirs publics mais aucune à ce jour ne propose de contrats d’assurance maladie susceptibles de se substituer à la Sécurité sociale. Aucune société d’assurance française n’en propose non plus. Seules certaines sociétés d’assurance européennes pratiquent à l’heure actuelle les opérations ci-dessus décrites. »
C’était aller un peu vite en besogne. Le monopole de la sécurité sociale n’étant pas formellement abrogé, ces dispositions autorisent uniquement les assurances privées à entrer en concurrence avec les mutuelles pour les assurances complémentaires... ce qu’elles ne se sont pas privées de faire avec bien souvent la complicité du patronat.
En effet, contrairement aux mutuelles à vocation solidaires, les assurances médicales privées pratiquent des tarifs différents pour les personnes en activité salariée et pour les retraités. Dans le cas ou une part du coût des assurances complémentaires est prise en charge par le patronat, c’est une fois encore, un moyen de réduire les charges... et tant pis pour la mauvaise surprise des nouveaux retraités à qui l’on propose de conserver sa « mutuelle » moyennant une sérieuse augmentation des cotisations !
Ou en est-on maintenant ? Lors de la réforme du régime de santé du printemps dernier, les mutuelles ( les vraies, pas les assurances privées toutes favorables à la « réforme ») ont été placées devant un choix. Soit elles décidaient de continuer à jouer la carte de la solidarité et s’opposaient aux mesures proposées, soit elles choisissaient l’individualisation du risque et de la cotisation et pouvaient espérer concurrencer les assurances privées...en se privatisant plus ou moins de fait. Celles qui ont fait ce choix ont, bien évidemment, soutenu les plans gouvernementaux.
L’idée n’est pas nouvelle et l’on peut citer d’Eric VANLERVERGUE, Président national de la Mutuelle du Ministère de l’Intérieur qui déjà en octobre 2002 écrivait : "L’application des directives européennes qui tend à faire jouer la libre concurrence va nous obliger un jour ou l’autre, à briser le monopole de notre sécurité sociale. L’Allemagne a, depuis 1996, déjà emprunté cette voie. La France, en publiant la loi du 17 juillet 2001, a entamé, elle aussi le processus. Le monopole de la Sécurité sociale, c’est terminé."
En octobre dernier, le journal « Le Parisien » s’est fait l’écho de la campagne engagé par le patron de Buffalo Grill pour inciter ses employés à quitter la sécurité sociale, ne plus payer de CSG etc...
Le refrain est toujours le même :
" Je veux être le premier chef d’entreprise à affranchir mes salariés qui le souhaitent de l’obligation de consacrer 45 % de leurs revenus au financement de leur protection sociale ", a-t-il confié hier à notre journal. Un souci de légalité " Cela leur permettra d’économiser entre 20 % et 30 % et de faire grimper d’autant leur pouvoir d’achat ", estime Christian Picart. Explication : " Si, comme le prévoient les directives européennes, un employé s’autoassure ailleurs qu’à la Sécurité sociale, nous n’avons aucune raison de continuer à lui prélever des charges sociales. Je m’engage, si nous pouvons effectivement le faire, à lui reverser dans son salaire l’équivalent des charges patronales. "
La réponse du ministre :
Voici, in extenso le communiqué de Douste-Blazy dont il faut souligner la clarté :
Philippe Douste-Blazy Ministre de la santé et de la Protection sociale
Xavier Bertrand Secrétaire d’Etat à l’Assurance Maladie
Paris, le 22 octobre 2004
COMMUNIQUE : Affiliation obligatoire à la sécurité sociale
A la suite de récentes informations parues dans la presse, le ministère de la Santé et de la Protection sociale et le secrétariat d’Etat à l’Assurance maladie rappellent que toute personne qui travaille et réside en France est obligatoirement affiliée au régime de sécurité sociale français dont elle relève : régime général des salariés, régimes des non-salariés ou régimes spéciaux.
A ce titre, elle est assujettie aux cotisations de sécurité sociale correspondantes, à la CSG et à la CRDS. Cette obligation respecte pleinement les directives européennes sur l’assurance (directives CEE 92/49 et CEE 92/96). Ces directives ont mis en place un marché unique de l’assurance privée mais ne concernent pas les régimes de sécurité sociale des Etats membres de l’Union européenne.
Ceci est explicitement indiqué dans l’article 2.2 dans la directive CEE 92/49.
La Cour de justice des communautés européennes, saisie de plusieurs recours portant sur l’obligation d’affiliation à la sécurité sociale, a confirmé par deux arrêts datant de 1994 et 1996, la conformité des dispositions du code de la sécurité sociale au droit communautaire.
Les entreprises qui inciteraient leurs salariés à ne plus cotiser à la sécurité sociale se placeraient dans une situation illégale faisant peser des risques juridiques lourds sur leurs propres salariés. Il est rappelé à cet égard que le refus d’acquitter les prélèvements sociaux et le fait d’inciter les salariés à cesser de cotiser à la sécurité sociale exposent l’employeur à des poursuites pénales.
La France a fait le choix d’une sécurité sociale solidaire protégeant l’ensemble de la population quelles que soient les caractéristiques d’âge ou de santé des citoyens.
Ce choix a été réaffirmé dans le cadre de la loi portant réforme de l’assurance maladie qui rappelle dans son article 1er : « La Nation affirme son attachement au caractère universel, obligatoire et solidaire de l’assurance maladie. »
La contrepartie des droits reconnus à tous les résidents en France est l’obligation pour tous de cotiser à ce socle commun de protection sociale.
Comme quoi la riposte peut aussi venir de là où on ne l’attend pas !
Les adversaires du monopole de la sécurité sociale ne désarment pas.
En réponse au communiqué du ministre, REICHMANN lui-même dit que son mouvement pour la liberté de la protection sociale (MLPS) va traduire en Cour de Justice les ministres qui s’opposent à cette liberté.
" Pour la première fois depuis dix ans, les représentants des pouvoirs publics osent écrire qu’en France il est obligatoire d’être affilié à la Sécurité sociale. C’est totalement faux ", s’emporte Claude Reichman. "Depuis 1994, poursuit-il, deux directives permettent à tous les preneurs d’assurances de faire appel à tout assureur ayant son siège dans la communauté. " Textes qui, selon lui, ont été transposés dans le droit français par deux lois - " 4 janvier 1994 et 8 août 1994 " - ainsi que par l’ordonnance du 19 avril 2001 ratifiée par la loi du 17 juillet 2001. " La loi, affirme Claude Reichman, donne ainsi à tout citoyen le droit de s’assurer pour la maladie, la retraite, les accidents du travail et le chômage auprès d’une société d’assurances, une institution de prévoyance ou une mutuelle. C’est très exactement ce droit que le président de Buffalo Grill, Christian Picart, a déclaré vouloir faire valoir pour ses salariés "
Fort de cet argumentaire, le MLPS conteste la thèse gouvernementale qui voudrait que " toute personne qui travaille et réside en France est affiliée obligatoirement au régime de sécurité sociale français dont elle relève ". " Dire que les entreprises qui inciteraient leurs salariés à ne plus cotiser à la Sécu se placeraient en situation illégale est scandaleux et appelle une sanction exemplaire ", affirme Claude Reichman. Et ce dernier d’invoquer le Code pénal, qui prévoit qu’une personne dépositaire de l’autorité publique prenant des mesures destinées à faire échec à l’exécution de la loi soit punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Rappelant que, selon la Constitution, les membres du gouvernement sont jugés par la Cour de justice de la République, le président du MLPS s’apprête donc à la saisir contre MM. Douste-Blazy et Bertrand. Egalement visé, Hervé Gaymard. Dans une lettre à un parlementaire datée du 26 août 2004, le ministre de l’Agriculture a, tout en reconnaissant la primauté des directives européennes, affirmé sa volonté de ne pas les appliquer en vertu de dispositions du Code rural. Or, selon Claude Reichman, ce dernier n’a plus la moindre légalité. " En matière
agricole aussi, il y a viol des lois de la République ", affirme-t-il. Une épreuve judiciaire en perspective qui, pourtant, n’effraie guère les ministères concernés. Interrogé hier, l’entourage de Philippe Douste-Blazy s’est montré très serein : " Nous avons des références juridiques très solides. Nous attendons avec impatience la délibération de la Cour de justice, avec les risques de recours abusif qu’une telle démarche constitue
pour les plaignants. " Et le ministère de rappeler que, selon lui, " les Etats membres organisent leur propre système de santé et que la France n’a pas fait le choix de la concurrence avec les assurances privées, comme en Allemagne ou en Hollande ". Point de vue similaire au ministère de l’Agriculture, où l’on considère que l’analyse juridique du MLPS est " totalement erronée et ne relève en aucun cas de la Cour de justice de la République ".
Nouvelle offensive via la législation européenne
Le trop célèbre projet de directive BOLKESTEIN prévoit de faire entrer la réglementation du système de soins dans le marché intérieur, alors qu’actuellement chaque Etat membre réglemente son propre système de soins et en définit les normes, permettrait aux travailleurs d’un pays membre de vivre dans le pays où ils travaillent avec les lois sociales et le droit du travail du pays d’origine de la société qui les a embauchés Le monopole de notre assurance maladie comme le système de répartition de nos retraites ne s’appliquerait donc pas. Le monopole serait cassé.
Concernant l’interprétation de la législation européenne, le ministère reste néanmoins sur ses positions : Pour lui l’obligation de cotisation à la sécurité sociale « respecte pleinement les directives européennes sur l’assurance". Ces directives ont mis en place un marché unique de l’assurance privée qui ne concerne pas les régimes de Sécurité sociale obligatoires, mais s’applique en revanche à tous les régimes de protection complémentaire facultatifs (prévoyance, maladie, retraite...). Ainsi, parce qu’ils sont obligatoires, les régimes complémentaires de retraite Arrco-Agirc sont considérés en droit européen comme un prolongement de la Sécurité sociale, donc soumis au monopole. En revanche, les sociétés d’assurance et mutuelles qui fournissent des contrats complémentaires facultatifs sont soumises à la concurrence et aux directives européennes qui ont d’ailleurs été transcrites en droit national dès 1994 dans le Code des assurances, en 2001 dans le Code de la mutualité. Saisie de plusieurs recours en 1993 et en 1996, émanant notamment de travailleurs indépendants (CDCA), la Cour de justice des Communautés européennes a, à chaque fois, confirmé ce fait que le communiqué de la Commission rappelle. En France, le refus d’acquitter les prélèvements sociaux et le fait d’inciter ses salariés à cesser de cotiser à la Sécu exposent d’ailleurs l’employeur à des poursuites pénales : 6 mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende, et même jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende pour ceux qui vont jusqu’à "organiser le refus par les assujettis de se conformer" à la loi.
Pour ne pas entraver la libre circulation des personnes, les règles de la coordination communautaire imposent à chaque Etat membre de conserver aux travailleurs qui quittent leur pays pour un emploi dans un autre Etat membre de lui conserver les droits acquis dans son Etat d’origine. De même chaque pays doit-il préciser quelle législation nationale de Sécurité sociale est applicable aux cas particuliers (frontaliers, détachements temporaires) : ainsi, par exemple, la loi française autorise un travailleur allemand résidant en France pour une période limitée à relever de la seule sécurité sociale allemande et donc des prélèvements applicables outre-Rhin. »
Retour sur le traité constitutionnel Comme rappelé au début, le texte du traité constitutionnel n’impose pas clairement la fin du monopole de la sécurité sociale.
On ne trouve que des références aux « services d’intérêt économique général », ce qui inclus tous les services publics et la sécurité sociale. Il s’agit surtout de l’article III-166
1 Les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n’édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire à la Constitution, notamment à l’article I-4, paragraphe 2, et aux articles III-161 à III-169.
2. Les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux dispositions de la Constitution, notamment aux règles de concurrence, dans la mesure où l’application de ces dispositions ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union.
Comme nous l’avons déjà analysé autre part, l’ensemble des articles III-161 à III-169 ouvre clairement la porte à la mise en concurrence des services publics.
Le seul aspect du texte qui pourrait autoriser le maintien du monopole de la sécurité sociale est dans la petite phrase « dans la mesure où l’application de ces dispositions ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie »
En s’appuyant sur une partie de la jurisprudence il semble possible de montrer que la suppression du monopole de la sécurité sociale ferait « échec à l’accomplissement en droit et fait de la mission particulière confiée à la sécurité sociale.
Reste que dans une Europe dominée par les libéraux, et comme le montre la tentative de directive BOKELSTEIN, la bataille ne fait que commencer et que l’adoption de la constitution donnerait « du grain à moudre » aux libéraux.
Dire aujourd’hui que l’adoption du traité constitutionnel entraînerait automatiquement la suppression du monopole de la sécurité sociale serait à la fois faux et désarmant pour les batailles futures en cas d’adoption de celle-ci.
Il reste que cette constitution ne donne aucune arme nouvelle pour défendre la sécurité sociale et que, pire, si elle était adoptée cela serait un sérieux encouragement à tous ceux qui ont déjà entrepris de réduire les services publics. Après la poste et l’EDF, la sécurité sociale serait dans le collimateur.
En sens inverse, le rejet de cette constitution par le peuple affirmant ainsi, une fois de plus, son refus de voir poursuivre la politique libérale, serait un encouragement extraordinaire pour tous ceux qui estiment encore possible le retour à un système de santé basé sur la solidarité.