Citoyen du monde à Montrouge n°115 de avril 2014 : 2017 : Sarkozy-Le Pen
[|Citoyen du monde à Montrouge, |]
[|numéro 115, avril 2014|]
[|[*2017 : Sarkozy-Le Pen*]|]
Attendez-vous à savoir…
Scénario le plus probable : Valls, chouchou des sondages, et nommé premier ministre pour cette raison, s’effondre à son tour. Le chômage, en effet, ne recule pas assez vite. Les entreprises engrangent les cadeaux, mais comment pourraient-elles embaucher si les carnets de commande sont vides ? Et comment la consommation pourrait-elle repartir si la population voit ses salaires stagner, et surtout si elle s’inquiète de l’avenir, avec la précarité et l’insécurité de l’emploi ?
Sarkozy fait un retour en force. Les concurrents, Fillon, Copé, Vauquier, et même Juppé, sont balayés, ils ne font pas le poids (les sondages ne leur donnent aucune chance) face à l’animal politique, l’homme de spectacle qu’est Sarkozy, qui n’a à s’embarrasser d’aucun scrupule, et qui n’a de compte à rendre à personne. Sarkozy dit qu’il a changé, il a chassé son mauvais conseiller (Buisson), il mène une campagne à gauche, citant Jaurès et Blum dans tous ses discours (merci Guaino). Et on le croit. Comment n’aurait-il pas changé, après toutes les épreuves qu’il a subies ? Les casseroles ? Quelles casseroles ? Des inventions d’envieux. Des vengeances de juges. D’ailleurs, il faudra bien les supprimer, une fois pour toutes, ces juges d’instruction. Rien ne vaut l’onction électorale. Patrick Balkany récemment mis en cause dans une affaire de fraude fiscale, n’a-t- il pas été réélu ? Et Serge Bechter, bras droit de Dassault mis en examen pour achat de votes ? Et Gilles Bourdouleix, à Cholet, condamné pour « apologie de crime contre l’humanité » ? Et Jacques Bompard, à Orange, poursuivi pour « prise illégale d’intérêt » ?
Le Pen s’envole. Les faits ne lui donnent-ils pas raison ? Valls n’est –il pas « sarkocompatible » ? N’a-t- il pas dit lui-même que le socialisme n’a plus de sens ? UMP et PS ne mènent-ils pas la même politique, le même néolibéralisme, qui conduit tous les pays d’Europe, les uns après les autres, à la désindustrialisation sauvage, au chômage massif, au démantèlement des services publics, à la corruption d’une partie des élites ? Ne convient-il pas d’essayer autre chose, qu’on n’a pas encore essayé (croit-on) ? Repli sur l’hexagone, retour au franc. Boutons l’étranger hors de France… Que du bon sens !
Alors vous, vous choisirez qui au deuxième tour ? Sarkozy, ou Le Pen ?
Y a-t- il encore une chance pour que ce scénario catastrophe (qui écarterait pour longtemps la gauche des affaires du pays) puisse être évité ?
Car, pour l’heure, la gauche existe encore en ce pays. Il n’y a eu en réalité ni « vague bleue », ni vague « bleu Marine ». Le seul événement, c’est l’abstention massive de l’électorat de gauche. C’est la déception et la colère de ceux qui avaient massivement voté Hollande en mai 2012. L’intransigeance de Cécile Duflot et Pascal Canfin, qui n’ont pas cherché à marchander leur présence dans le gouvernement Valls, est plutôt réconfortante. Comment croire, en effet, après deux ans d’immobilisme ou de reculs, que la grande affaire du moment va être la transition énergétique ? Et que la nécessaire remise à plat fiscale n’est pas purement et simplement abandonnée (au contraire, le gouvernement, pour plaire à la droite et aux « 1% » les plus favorisés, annonce des réductions d’impôt…) ?
A Grenoble, c’est une nouvelle gauche, EELV-PG-citoyens, qui émerge.
Ce n’est pas tout le système politique qui est en crise, c’est la gauche au pouvoir. Il est malheureusement trop facile de décrire les errements du chef de l’Etat, son absence de vision à long terme, son incapacité à équilibrer justice sociale et efficacité économique, ses méthodes actuelles de gouvernement, collant à l’actualité, et faites d’avancées vite suivies de reculs.
Les parlementaires de gauche savent très bien qu’une prochaine étape de la descente aux enfers les emportera. Il est grand temps qu’ils fassent entendre leur voix, qu’ils élaborent des propositions politiques collectives. Une centaine d’entre eux ont élaboré un « contrat de majorité » (réorientation de la politique européenne, refus d’une politique unilatérale de baisse des charges aux entreprises sans contrepartie, augmentation du pouvoir d’achat), et ont fait savoir qu’ils ne voteront pas comme des godillots la confiance qui leur sera demandée. 40 % des dirigeants du Bureau National du PS appellent à une autre politique à gauche (et font circuler une pétition parmi les militants socialistes). Ce n’était jamais arrivé dans l’histoire du PS.
Les intellectuels, les citoyens, doivent sortir de leur silence. A la télévision, la démocratie est souvent réduite aux acteurs purement politiques, et aux représentants de médias et des instituts de sondages. La renaissance de la gauche implique un travail sur la longue durée, qui ne peut être confié aux seules équipes du pouvoir exécutif.
Des combats sont à mener, sans attendre. Contre le projet de grand marché transatlantique UE-USA, concocté en secret, qui vise à rien moins qu’à démanteler l’appareil législatif et réglementaire de 28 Etats, considéré comme un obstacle excessif à la concurrence. Et pour réorienter l’Union européenne, pour la remettre au service des peuples et non plus des marchés financiers.
L’heure est grave. Il faut refonder la gauche, réorienter l’union européenne. Chacun de nous à son rôle à jouer.
La suite dans le document-joint.