OMC, Cancun, La propriété intellectuelle
OMC, Cancun, La propriété intellectuelle
Cette petite note a pour but de donner des informations de base sur la propriété intellectuelle qui a été l’un des enjeux majeurs des conférences de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de Seattle et Doha et qui sera au centre des discussions de Cancun en septembre prochain notamment autour des médicaments génériques.
Rappel sur le commerce international
Les composantes du commerce international sont les suivantes :
– le commerce des marchandises (produits manufacturés, produits agricoles, matières premières) pour 6186 milliards $ en 2000 ;
– le commerce des services (1435 milliards $) ;
– les investissements (1271 milliards $) ;
– les mouvements de capitaux (accompagnement du commerce international, prêts, spéculation) pour un total de 1500 milliards $ par jour ;
– le commerce qui porte sur les droits de propriété intellectuelle.
Qu’est-ce que la propriété intellectuelle ?
Des biens incorporels tels que les inventions (brevets), les marques (appellations), les œuvres à droits d’auteur, les indications géographiques, les dessins et les modèles donnent à leur propriétaires un monopole d’exploitation (brevets) ou d’usage (marques) pendant une longue période.
Ces droits peuvent être cédés (cession d’un brevet) ou donnés en location (accord de licence). L’exercice de ces droits régit la propriété intellectuelle.
La convention de Paris du 20 mars 1883 sur la protection de la propriété intellectuelle
C’est une Convention - une Union - entre Etats gérée actuellement par l’OMPI (Office mondial de la propriété intellectuelle) qui porte sur les brevets, marques, dessins, modèles et indications géographiques. La Convention de Berne de 1886 la complète par la protection des œuvres littéraires et artistiques.
La Convention entérine la territorialisation des droits. Le régime de propriété intellectuelle dans un Etat est inopposable hors de ses frontières. Le propriétaire d’un doit, pour le faire reconnaître, faire un dépôt (une demande) dans chaque Etat, mais il est protégé contre un dépôt illicite portant sur le même objet, pendant une période de temps, une fois qu’il a fait une demande dans un des pays signataires de la Convention.
L’arrangement de Marrakech du 14 avril 1891 sur l’enregistrement des marques permet un dépôt unique de marques dans un des pays signataires.
Il faut bien noter que la Convention de Paris aussi bien que les accords de Berne et Marrakech n’établissent pas un régime unique de protection de la propriété intellectuelle dans les Etats signataires :
– la procédure d’obtention du droit reste nationale ;
– le contenu du droit de propriété intellectuelle reste lui aussi national (durée, conditions, déchéance, etc.).
La Convention de Washington du 13 juin 1970
C’est un traité de coopération en matière de brevets qui institue un système international de demande. Le propriétaire de l’invention fait une seule demande portant sur un nombre multiple de pays. Il obtient, après évaluation, un brevet national dans chaque Etat désigné.
Cent quinze Etats ont signé cette Convention. Le nombre de demandes est passé de 20000 en 1991 à 120000 en 2001.
La Convention de Munich sur la délivrance de brevets européens et les autres accords européens
Cette Convention a été ratifiée par vingt-quatre Etats européens. Elle crée un Office européen de brevets (OEB). Au titre de cette Convention le propriétaire de l’invention obtient un pseudo brevet européen. Ce brevet n’est pas un brevet international mais un ensemble de brevets nationaux régis par les droits de Etats concernés.
Un règlement du Conseil des ministres de l’Union européenne du 20 décembre 1993 entré en vigueur le 1er janvier 1996 institue un système de marque européenne.
Le brevet réellement européen est en cours de discussion. La base est définie par la Convention de Luxembourg du 15 décembre 1975. Cette Convention a été modifiée en 1989. Elle a été reprise par la Commission le 28 novembre 2000. Le Parlement européen a émis un avis favorable le 28 novembre 2000. Mais le brevet européen n’a pas encore été adopté.
Importance des droits de propriété intellectuelle
Les droits de propriété intellectuelle peuvent être vendus par le propriétaire par un contrat de cession ou loués par un contrat de licence contre une redevance (royalty).
La propriété intellectuelle - et le droit qui s’y applique - est un facteur essentiel (avec l’investissement) des transferts de technologie entre Etats.
Les accords de propriété intellectuelle à partir des années 1970 ont été ressentis par les pays du sud comme des instruments de domination du nord sur le sud. En effet ces accords étaient assortis de clauses restrictives telles que :
– les achats liés (obligations d’achat du récepteur du sud auprès du détenteur du nord) ;
– la détermination par le détenteur des modes de production ;
– l’obligation faite au récepteur de communiquer au détenteur tous les perfectionnements réalisés sur les procédés ;
– la limitation ou l’interdiction des exportations.
Certains pays d’Amérique latine et d’Asie ont donc instauré un contrôle des accords de propriété intellectuelle dont le but était de réduire ou d’interdire ces clauses restrictives.
Les pays du nord ont répondu à ces contrôles par un gel des cessions et des licences.
Le 15 avril 1994 est signé un traité sur la propriété intellectuelle au sein de l’OMC. C’est l’Accord sur l’aspect des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce - ADPIC ou Trade Related Aspects of Intellectual Property.
C’est une révolution qui fera l’objet d’une prochaine note.
Alain Lecourieux 12 août 2003