Porto Alegre : PoA ou le peuple retrouvé !
Depuis 1789 et pour beaucoup de politiques, le peuple est dangereux ou incompétent ; il faut le tenir à l’écart et c’est l’un des rôles de la démocratie représentative.
Depuis douze ans, « le budget participatif » de Porto Alegre (PoA), ville de 1,4 million d’habitants, est une réponse concrète et locale à ces détracteurs et à la crise de la démocratie représentative : les habitants cogèrent leur ville avec les élus, tout au long du processus : information, délibération, décision et contrôle (1).
Pour que la démocratie participative fonctionne, il a fallu inventer et réunir progressivement les conditions de son exercice :
– toutes les règles de fonctionnement sont décidées démocratiquement, ajustées chaque année et reconnues dans la loi organique de la ville ;
– la municipalité fournit aux habitants les moyens nécessaires : propositions, expertise, formation, outils et documents particulièrement clairs ; mais elle s’abstient de toute manipulation et reconnaît les citoyens comme seule source des décisions ;
– à côté des seize comités de quartier, cinq comités thématiques s’occupent des questions qui ne peuvent se régler qu’à l’échelle de la ville dans son entier ; le tout assure la nécessaire proximité, mais combat l’esprit de clocher ;
– le calendrier annuel est rigoureux ; il fait partie des règles de fonctionnement ; les habitants le connaissent et savent qu’il convient de le respecter.
Quels sont les résultats ?
Les habitants voient les effets concrets et féconds de leurs décisions ; un nouvel espace politique est né où les citoyens sont reconnus comme membres d’une société ; ils apprennent à relativiser leurs demandes et à faire des choix ; ils comprennent aussi les limites du pouvoir municipal et poursuivent leurs luttes dans des mobilisations plus larges à l’échelle du Rio Grande do Sul ou du Brésil.
Oui, « le budget participatif » de POA démocratise radicalement la démocratie.
Oui, le Sud a des choses à nous dire et nous pouvons les écouter, ici et maintenant, en France.
Aux antipodes des simplifications et des démissions, du populisme et du clientélisme, la démocratie participative n’est pas une utopie : là aussi, dans la vie locale, um outro mundo é possivel !
Alain Lecourieux
de retour de PoA
(1) Lire : « Quand les habitants gèrent vraiment leur ville », Tarso Genro et Ubiratan de Souza – Editions Charles Léopold Meyer 38, rue Saint-Sabin 75011 Paris – 01 48 06 48 86