Citoyen du monde à Montrouge n°114 de mars 2014 : Classe politique

, par attac92
















[|Citoyen du monde à Montrouge, |]
[|numéro 114, mars 2014|]


[|[*Classe politique*]|]

L’idée que la politique serait un métier est choquante. Idéalement, la politique est l’affaire de tous, et parmi ceux qui se sentent le plus concernés, des citoyens se dévouent pour représenter les électeurs, et défendre l’intérêt général. Les fonctions d’élus comportent nombre d’obligations ingrates, et les administrés se montrent parfois peu reconnaissants (toutefois, les maires sont les moins atteints par le discrédit général -souvent injustifié- qui touche le « personnel politique »)… Dans ces conditions, que l’on dénombre 926 068 candidats aux élections municipales, pour 44, 566 millions d’électeurs (soit plus de 2 %), est une excellente nouvelle. Il n’y a que 64 communes sur les quelque 36 000, qui n’ont pas trouvé de candidats (dans ce cas, de nouvelles élections sont organisées dans un délai de trois mois, et si aucun candidat ne se déclare, la commune est dissoute et fusionnée avec d’autres).

Cependant, plus les responsabilités sont élevées (villes moyennes et grandes, circonscriptions, conseil départemental, conseil régional, …), plus les élus se « professionnalisent ». On aimerait bien que les fonctions de représentation soient temporaires, révocables, et que le titulaire retourne à son activité professionnelle normale après un ou deux mandats… L’interdiction du cumul des mandats va un peu dans ce sens, mais il faudrait un statut de l’élu qui permette à chacun, après un mandat électoral, de retrouver son emploi. A défaut, c’est la fonction publique qui se trouve surreprésentée (ou ceux que leur fortune personnelle met à l’abri de ce genre de contingences…).

Le personnel politique, au-delà des conseils municipaux de petites communes, n’est donc pas sélectionné par l’éminence de sa vertu, ou la clairvoyance de ses vues ; mais plutôt par la confiance élevée en sa propre valeur et l’acceptation de bien des sacrifices pour la conquête du pouvoir. Sarkozy, Copé, ne rêvaient –ils pas, depuis tout petits, de devenir président de la République ? La France se donne à celui qui la veut le plus, avait coutume de dire en son langage imagé le même Sarkozy…

Inévitablement, on trouve au sein de ce personnel politique des opportunistes, qui n’ont pas de vision bien claire de la direction vers laquelle le pays doit aller, ou même qui choisissent le parti dont ils pensent qu’il leur assurera une carrière plus sûre… Ceux qui veulent « positiver » loueront leur « art du compromis » (illustré par Hollande et les « Transcourants », au sein du PS), leur « pragmatisme », et comprendront leurs renoncements, leurs contorsions et leurs zigzags, comme autant de preuves d’une adaptation aux réalités du terrain et de la conjoncture… Les autres interprèteront les foucades et sincérités successives comme autant de preuves de mauvaise foi ou de mensonges… quand ils n’iront pas jusqu’à les accuser de corruption (« tous pourris… ! »).

Dans ce contexte, les gourous prennent beaucoup d’importance, Juillet et Garaud pour Chirac, Buisson et Gaino pour Sarkozy… Et les sondages d’opinion servent à orienter les discours, et les actes, vers ce qui fera gagner des points de popularité. Alors qu’il faudrait que ce soient les dirigeants qui décryptent le monde où nous vivons, les dangers qui nous menacent, les opportunités qui se présentent ; qu’ils nous montrent la voie, et qu’ils entraînent le peuple dans cette voie, par un effort de pédagogie exigeante. Changement climatique, transition démographique, transition énergétique, transition vers une Europe supranationale, récupération par les peuples des biens publics aujourd’hui accaparés par les oligarchies : aucun de ces grands enjeux n’est vraiment traité dans le débat public, qui bien souvent se réduit aux petites phrases, au buzz et aux twits, et à la politique au jour le jour…

Tout cela est aggravé en France par le caractère monarchique du régime. Tout repose sur la perspicacité, qui n’est pas sans faille, des citoyens pour se choisir un roi. Les partis dominants, PS et UMP, organisent des primaires ouvertes, ce qui est sans doute un progrès, car cela permet d’impliquer les citoyens au-delà du cercle de militants (qui sont, dans le cas du PS, presque uniquement des élus). Les partis dominants, qui ont ainsi abandonné le monopole de la sélection des candidats pour les plus hautes fonctions, ont aussi cessé d’être des sources d’idées, de renouvellement de la pensée. Ils s’appuient désormais pour cela sur des « think-tanks »…D’où l’intérêt qu’existent des mouvements d’éducation populaires tels qu’Attac, qui ne sont pas engagés dans le combat électoral, et cherchent à faire émerger des idées au sein de la population (au risque du sentiment frustrant d’une certaine impuissance…).

Il convient donc de réfléchir aux moyens de réduire en France la toute-puissance, lourde de dangers, du président-roi. Sans pour autant tomber dans les magouilles et le gouvernement au centre que nous avons connu sous la IV e République, ni la paralysie du président aux Etats-Unis, ni les fantasmes d’une « démocratie directe » avec révocation des élus…

Il importe de renforcer les contre-pouvoirs, en particulier l’indépendance de la justice (dont on peut mesurer aujourd’hui à quel point elle est précieuse…) et d’une (hélas petite) partie de la presse.

Il n’y a pas de « classe » politique. Il y a la classe des 1% les plus riches. Et la classe des 99% restants, dont la plupart se laissent hélas manipuler –libéralisme économique, divisions artificielles, xénophobie voire racisme -pour le plus grand profit des premiers…

La suite dans le document-joint.